Au cours des 40 dernières années, l’industrie des combustibles fossiles s’est de plus en plus préoccupée de son image de pollueuse auprès du public. Pour contrer cette perception, elle a engagé des agences de publicité et de relations publiques, comme Publicis Groupe, pour construire une image plus favorable d’elle-même. Les chiffres prouvent que pour des entreprises telles que TotalEnergies, qui ont fait appel à Publicis Groupe pour leur changement d’image, seuls 25 % des nouveaux investissements sont effectivement consacrés aux énergies renouvelables, alors que 62 % de leurs revendications marketing sont basées sur le fait que l’entreprise s’oriente vers les énergies renouvelables. (Source)
Outre Total Energies, Publicis Groupe a également représenté Saudi Aramco et travaille actuellement pour Abu Dhabi National Oil.
Avec environ 80 000 employé.e.s dans plus de 100 pays, Publicis Groupe est l’une des quatre grandes agences de publicité et de communication dans le monde. L’entreprise se positionne à chaque étape de la chaîne de valeur : de la création à la production, du marketing digital à la communication stratégique en passant par le marketing d’influence ( «influencer marketing »).
Pourquoi Publicis Groupe devrait-il cesser de travailler pour les entreprises de combustibles fossiles ?
Représentant nos actionnaires, nous pensons que Publicis Groupe s’expose à des risques inutiles et démesurés en matière de réputation, de réglementation et de droit.
Risques réglementaires et commerciaux
- Le risque d’une réglementation interdisant la publicité pour les énergies fossiles augmente, les premières autorités ont déjà publié de telles interdictions et d’autres envisagent de leur emboîter le pas. Une campagne intitulée « Ban Fossil Fuel Ads », menée par des ONG de premier plan telles que Greenpeace et le Fonds Mondial pour la Nature, appelle à une interdiction de la publicité pour les compagnies pétrolières, automobiles et aériennes, à l’instar de ce qui se fait pour le tabac. (Source) Bien que des limitations et des failles notoires subsistent, une telle interdiction a déjà été mise en œuvre en France et dans des villes comme Amsterdam, tandis que d’autres villes comme Liverpool, Stockholm et Sydney l’envisagent. (Source, Source, Source, Source)
Risques juridiques, risques de litiges
- On observe également un examen de plus en plus minutieux par les autorités publiques des allégations de greenwashing. En octobre 2021, un groupe d’expert.e.s de la Chambre des représentant.e.s des États-Unis a interrogé les PDG de compagnies pétrolières sur leur rôle dans la diffusion de fausses informations sur le changement climatique et les a assigné.e.s à comparaître pour obtenir les documents relatifs à leurs dépenses en agences de relations publiques. Selon Reuters, l’enquête devrait également porter sur ces entreprises tierces. (Source)
- En outre, diverses formes de litiges climatiques sont utilisées par les activistes pour pousser les entreprises à agir davantage en faveur du climat. Plusieurs procès accusent de grandes entreprises pétrolières et gazières de greenwashing, citant des campagnes de publicité et de marketing qui affirmeraient de façon non fondée l’impact environnemental de leurs produits. Entre autres, une action en justice a été intentée contre TotalEnergies pour avoir utilisé une publicité mensongère : elle visait à convaincre les consommateur.trice.s que l’entreprise était en mesure d’être neutre en carbone d’ici 2050, tout en continuant à promouvoir et à vendre davantage de combustibles fossiles. (Source) Bien que les agences de relations publiques et de publicité ne soient pas encore directement nommées comme accusées, elles font généralement l’objet d’enquête, ce qui représente un risque potentiel futur pour Publicis.
Risques de réputation et de marque
- Il existe un risque évident que Publicis ait de plus en plus de mal à attirer les bons talents si l’agence continue à travailler pour des entreprises d’énergie fossile à l’avenir. Les talents sont la ressource la plus précieuse dans le secteur des relations publiques et de la publicité. Comme l’ont montré des études récentes de Deloitte et de McKinsey, les jeunes générations, à savoir les millenials et la génération Z, ont une vraie volonté de travailler dans un environnement à valeurs et mission fortes. (Source , Source , Source, Source) C’est encore plus vrai dans les industries créatives. Une enquête sectorielle menée par l’ONG Comms Declare auprès des professionnel.le.s de la communication de moins de 30 ans en Australie a révélé que 73 % d’entre eux.elles hésitent à travailler avec des client.e.s utilisant des combustibles fossiles, tandis que 67 % pensent que leurs agences devraient adopter une position plus ferme à l’égard des client.e.s utilisant des combustibles fossiles. (Source) Ce risque pour les talents n’est pas hypothétique : un exemple majeur de perte de talents s’est produit en 2015 chez Edelman, une autre grande agence de relations publiques, lorsque quatre cadres ont quitté l’entreprise, invoquant comme raison son implication avec des client.e.s du secteur des énergies fossile. (Source)
- Les entreprises sont de plus en plus surveillées quant à leur chaîne de valeur et les fournisseurs qui en font partie (Source). Par conséquent, nous pensons que les entreprises devant choisir un fournisseur de RP et de marketing chercheront de plus en plus à comprendre pour qui d’autre ces agences travaillent et nous pensons que si Publicis continue de travailler pour les entreprises d’énergie fossile, cela pourra compromettre sa capacité à attirer de nouveaux.elles client.e.s et donc à engendrer une chute du chiffre d’affaire. Les marques grand public sont particulièrement exposées à ce risque et devront en tenir compte lors du choix de leurs partenaires.
À quoi ressemblera l’engagement avec l’entreprise choisie dans le cadre de notre initiative ?
Tout d’abord, nous allons envoyer une lettre officielle à Publicis qui aborde la question de la publicité faite pour les entreprises de combustibles fossiles. Nous aimerions en savoir plus sur la façon dont le groupe considère la réduction de ses propres émissions de CO2, tout en promouvant des entreprises qui alimentent la crise climatique avec leurs émissions. Nous aimerions également connaître son point de vue sur les risques liés au “mouvement sans fossile” et savoir s’il a mis en place des mesures pour les atténuer.
En fonction de sa réponse, nous envisagerons différentes mesures. Ces mesures peuvent aller d’un questionnement public lors de leur assemblée générale annuelle au dépôt d’une résolution actionnariale.
L’objectif final est de pousser Publicis à refuser les futurs contrats avec les entreprises de combustibles fossiles, devenant ainsi un modèle à suivre en matière d’action climatique dans l’industrie de la publicité.
Qui sont les autres défenseur.euse.s de l’initiative visant à interdire les publicités pour les combustibles fossiles ?
Le secrétaire général des Nations unies, le WWF, Greenpeace et bien d’autres ont dénoncé les pratiques de l’industrie de la publicité. Voir la liste des supporters ci-dessous :
- Selon une étude réalisée en novembre 2021 par des chercheur.euse.s de l’université de Brown, les agences de relations publiques sont un acteur organisationnel clé de la politique climatique.
- Ces résultats ont été réitérés par le Groupe d’expert.e.s intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) dans son dernier rapport et par le secrétaire général des Nations unies António Guterres, dans son discours de septembre 2022. (Source , Source , Source) Les voix réclamant la fin de l’ère des combustibles fossiles se font de plus en plus entendre et reçoivent également le soutien d’acteur.trice.s majeurs tels que le secrétaire général des Nations unies.
- Le mouvement mondial “Fossil Free”, composé d’activistes, d’ONG, de politicien.ne.s et de scientifiques, cherche à éliminer les combustibles fossiles dans différents domaines, qu’il s’agisse de désinvestissement dans le secteur financier, de mettre fin au financement des universités ou de cibler les cabinets d’avocat.e.s représentant des client.e.s dans le domaine des combustibles fossiles. (Source , Source , Source , Source)
- Les nations les plus touchées par le changement climatique, à savoir Vanuatu et Tuvalu, ont appelé les autres États à élaborer un traité de non-prolifération des combustibles fossiles.
- En octobre 2022, le Parlement européen et l’Organisation mondiale de la santé se sont joints à leur appel, qui comprend l’arrêt de toute nouvelle exploration et production ainsi que l’élimination progressive de la production existante de combustibles fossiles, conformément à l’objectif climatique mondial de 1,5°C. (Source)
- Le mouvement Fossil Free s’attaque désormais aussi à l’industrie des relations publiques et de la publicité. En janvier 2022, plus de 450 scientifiques ont appelé via une lettre les dirigeant.e.s des principales agences de publicité et de relations publiques à abandonner leurs client.e.s du secteur des énergies fossiles. (Source)
- Une campagne intitulée « Ban Fossil Fuel Ads », menée par des ONG de premier plan telles que Greenpeace et le Fonds Mondial pour la Nature, appelle à interdire, à l’instar du tabac, la publicité pour les compagnies pétrolières, automobiles et aériennes. (Source)
- Bien que des limitations et des failles notoires subsistent, une telle interdiction a déjà été mise en œuvre en France et dans des villes comme Amsterdam, tandis que d’autres villes comme Liverpool, Stockholm et Sydney l’envisagent également. (Source , Source , Source , Source)
- Il existe également deux initiatives pertinentes au sein de l’industrie créative : Clean Creatives, qui demande aux agences de s’engager à refuser tout contrat futur avec des entreprises de combustibles fossiles, et le Creative Carbon Disclosure, qui vise à accroître la transparence sur les conflits climatiques potentiels en fournissant un modèle pour divulguer les relations commerciales avec les « client.e.s à forte intensité carbone ». Outre les entreprises de combustibles fossiles, ces client.e.s comprennent également les producteur.trice.s de viande bovine et de plastique. (Source, Source)
Comment les investisseur.euse.s d’impact Inyova peuvent-il.elle.s susciter un réel changement ?
Chez Inyova, nous pensons qu’il devrait être facile pour les gens d’exercer leurs droits d’actionnaires. Et nous pensons que l’un des principaux moyens de façonner un avenir meilleur est de faire pression et de s’engager auprès des plus grandes entreprises du monde, en les mettant sur la bonne voie pour plus de durabilité.
Pour soutenir des initiatives d’impact comme celles-ci, Inyova a lancé un nouveau service de pointe pour les propriétaires actif.ve.s. Ce nouveau service permet aux investisseur.euse.s d’impact d’Inyova de voter facilement pour soutenir les initiatives d’impact et leur permet même d’acheter des actions dans le but d’engager les entreprises dont il.elle.s sont actionnaires, et tout ça en un simple clic.
Les actionnaires peuvent agir pendant que notre équipe d’impact recherche et compile des preuves sur les entreprises de notre univers Inyova qui ont le plus grand potentiel d’impact. En fait, c’est l’essence même de l’investissement d’impact. Il ne s’agit pas seulement d’investir dans les quelques entreprises qui font tout correctement, mais plutôt d’identifier les entreprises qui, si elles sont mises sur la bonne voie, peuvent avoir un impact significatif.
Qu’est ce que l’actionnariat actif ?
Le fait de posséder des actions d’une entreprise fait de toi un.e propriétaire de cette entreprise. Devenir un.e propriétaire actif.ve signifie simplement que tu utilises tes droits d’actionnaire pour engager une discussion avec l’entreprise dans laquelle tu as investi et l’influencer.
Voici quelques façons pour que tu deviennes un.e propriétaire actif.ve :
- Tu peux faire usage de tes droits d’actionnaire, comme le droit de voter, d’assister ou de prendre la parole à une assemblée générale annuelle.
- Tu peux également t’engager auprès d’une entreprise, ce qui n’est qu’une façon élégante de dire que tu peux entamer un dialogue avec ces entreprises. L’objectif est généralement de répondre à tes préoccupations et d’influencer l’orientation de l’entreprise.
Pourquoi ne pas simplement retirer Publicis Groupe de l’univers d’Inyova ?
Il y a trois raisons pour lesquelles nous ne voulons pas simplement retirer Publicis de notre univers :
- Publicis fait partie de l’univers Inyova pour de bonnes raisons. Nous pensons qu’il s’agit d’une entreprise solide, car elle est très bien classée en matière d’égalité des sexes. Avec WPP, Publicis a les objectifs climatiques les plus ambitieux de tous les acteur.trice.s du secteur. Cela dit, nous pensons que, de par sa taille et sa stature dans l’industrie, Publici Groupe a le potentiel de devenir un modèle de changement en cessant de travailler pour des entreprises de combustibles fossiles.
- L’investissement d’impact, par définition, consiste à trouver des entreprises où les actionnaires peuvent avoir un impact en faisant pression pour changer les choses. Nous pensons que Publicis Groupe, s’il se met sur les bons rails, peut avoir un impact majeur – non seulement en cessant de déployer ses services créatifs pour le compte d’entreprises productrices de combustibles fossiles, mais aussi en faisant office de pionnier et de modèle pour le secteur.
- Nous pensons que cette campagne est une grande opportunité pour Publicis ! L’entreprise a le potentiel de devenir un leader de l’industrie en cessant de travailler pour l’industrie des combustibles fossiles. Nous pensons que cela ne l’aidera pas seulement à atténuer les risques en termes de réputation et à réduire son exposition réglementaire et juridique, mais aussi que cela représente une opportunité majeure pour l’entreprise en termes de leadership industriel et de rétention des talents.